L’art de la plume



L’art de la plume est une pratique quasi commune à toutes les populations de l’Amérique tropicale. Il représente l’expression la plus singulière pour affirmer son identité ethnique, sociale et culturelle. La plumasserie d’une communauté est régie par des codes et des contraintes socioculturelles. Ainsi, la morphologie, la technique et les combinaisons de couleurs d’un objet dépendent d’un univers culturel propre au groupe ethnique auquel appartient l’artisan.
Activité essentiellement masculine, l’apprentissage du travail de la plume se déroule souvent durant ou après les rituels d’initiation. Très tôt, un jeune garçon doit savoir fabriquer des flèches aux pointes en os ou en bambou aiguisé, des flèches assommoir pour capturer des animaux vivants, tirer à la carabine et dresser des pièges. Ensuite, il doit être capable de plumer un oiseau et de classifier les plumes selon leurs formes et leurs couleurs.
Les plumes sont classées en trois catégories : les pennes provenant de la queue ou des ailes avec un aspect fusiforme et de superficie continue; les plumes qui recouvrent les côtes et l’abdomen, larges et arrondies et les plumules du jabot de structure duveteuse.
Pour amplifier le potentiel esthétique de l’objet, la matière-plume peut être combinée à d’autres éléments éclectiques comme griffes, cuir, peau de mammifères, graines, cheveux humains, nacres, fibres végétales, fil de coton, plastiques synthétiques et aluminium.
Les Amérindiens ont développé des techniques d’assemblage des matières premières qui englobent une multitude de procédés consistant à fixer sur une filière une série de plumes petites et grandes. Ils peuvent aussi, grâce à la technique de collage à l’aide de résine, de cire ou de suie, disposer les plumes sur des supports de tissu ou de bois. La plume peut, dans certains cas, subir des transformations en étant taillée de formes diverses : épointage, en dent-de-scie, triangulaire.
Les Amérindiens profitent avantageusement de la diversité des espèces ornithologiques du bassin amazonien. Le nombre d’oiseaux fournisseurs varie sensiblement d’une production ethnique à l’autre. La sélection des espèces dans la plumasserie est davantage le fait d’un choix dicté par la tradition que par la richesse ou la pauvreté du milieu naturel. Les perroquets, les aras, les toucans, les hoccos, oiseaux pouvant être élevés en semi-captivité, sont les principaux pourvoyeurs de matières premières. Bon nombre de ces oiseaux ne livrent qu’une partie infime de leur plumage. L’ara macao, quant à lui, entre dans l’art plumassier de tous les groupes et offre la quasi totalité du spectre des couleurs.